Vulnérables, précaires et privées d'éducation, les filles, une fois mariées, subissent de graves violations des droits humains. En Afrique et dans le reste du monde, le mariage forcé concerne 12 millions d’enfants. Les législations en vigueur restent fragiles. Au travers des témoignages de 251 filles et jeunes femmes dans 15 pays différents, l’ONG Plan International a publié mercredi 1er octobre son rapport intitulé : “Laissez-moi être une enfant, pas une épouse : le vécu des filles confrontées au mariage d’enfants”.
Le sexisme favorisent “la normalisation” de la violence
Le Togo, le Nigéria, l’Ouganda, le Mozambique, la Zambie, l’Éthiopie et le Niger ont tous les sept été étudiés pour ce bilan. Tous ont ratifié la CEDAW — la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes — à l’exception du Niger. Niamey enregistre le plus haut taux mondial d’application de cette pratique : “Trois femmes sur quatre âgées de 20 à 24 ans ont été mariées avant 18 ans”, évalue Lucie Dechifre, porte-parole de l’ONG Plan International France.
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Dans les régions d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, la différence d’âge entre les époux est plus prononcée que dans le reste du monde. Plusieurs facteurs expliquent cet écart. Pour commencer, les inégalités entre les sexes, le sexisme favorisent “la normalisation” de la violence. Elle renforce “l’idée qu’un homme doit avoir autorité” sur sa conjointe, précise Lucie Dechiffre.
Investir pour l'éducation des filles “n’a pas d’intérêt”
Foziya, l’une des témoins, originaire d’Éthiopie, raconte que dans sa communauté, il est fréquent que les filles soient mariées dès 15 ans. Les parents “pensent que s’ils ne peuvent pas contrôler le comportement sexuel de leur fille, elle aura des relations sexuelles”, explique t-elle. L'âge minimum pour qu’une fille se marie est généralement fixé à 18 ans. Pourtant, “à partir du moment où elle (la fille) a ses menstruations, elle est en âge de se marier”. La famille, le tuteur ou le juge peut ainsi forcer la législation et marier l’homme et l’enfant, indique l’humanitaire.
La gente féminine “représente un poids pour la famille”, analyse la porte-parole. Investir dans son éducation “n’a pas d’intérêt”. Une fois le cursus scolaire terminé, rien n’indique que leur progéniture trouvera un travail ou une formation.
- Lire aussi : Mozambique : les enfants de plus en plus nombreux à subir l’enrôlement, le mariage et le travail forcé
La précarité et la marginalisation
Au Togo, Ayomide, une épouse de 15 ans, confie que son père ne s’occupe pas correctement d’elle : “Il (son père) dit qu’il n’a pas assez d’argent pour subvenir à mes besoins... Parfois, j’ai l’impression d’avoir changé de père. Je pleure quand je pense à son comportement envers moi.” Alors, certains parents s’allègent et préfèrent le mariage forcé.
Cette pratique s’observe largement au sein des milieux précaires et vulnérables. “Les personnes qui sont victimes de crises liées aux changements climatiques mais aussi à des conflits et qui vont être en situation de déplacement” sont particulièrement touchées.
Les réseaux sociaux mis en cause
À l’inverse, d’autres jeunes filles peuvent ressentir un sentiment d’indépendance factice. Les réseaux sociaux leur donnent “l’illusion de sortir du contrôle parental", mais les enferment dans une relation d’emprise où elles perdent toute autonomie. Ces filles se sentent souvent obligées de s’unir avec les hommes avec lesquels elles ont discuté, car souvent, le futur marié profite de la pression sociale subie par la jeune femme une fois la relation dévoilée au grand jour. Cette union, conclut la travailleuse humanitaire, ne peut se fonder sur le consentement “tout simplement parce que [ce sont] des enfants”.
Le mariage de mineures représente “une violation des droits humains fondamentaux”. Les conséquences sur le corps d’une telle grossesse sont “dramatiques”.
Une manière de limiter ce fléau, pour l’ONG Plan International, passe par la lutte contre les facteurs favorisant cette situation, notamment la pauvreté, l’accès à l’éducation, aux soins et à l’information. L’adoption de politiques publiques strictes permettrait également d’affronter cette problématique à l'échelle nationale.
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